En date du 19 janvier 2024, le Conseil national de la productivité (CNP) a présenté et remis son rapport annuel 2022-2023 au ministre de l'Économie, des PME, de l'Énergie et du Tourisme, Lex Delles, qui a souligné l'importance de la productivité pour conforter la compétitivité des entreprises, soutenir l'évolution des salaires réels, pérenniser le modèle socioéconomique et réussir la transition écologique de l'économie.
Serge Allegrezza, président du CNP, a évoqué différentes facettes de la productivité et a rappelé que la productivité est une notion essentielle susceptible d'éclairer une série des grandes questions de politique économique, sociale et environnementale.
Dans son rapport annuel, intitulé "La productivité − un moteur de la compétitivité", le CNP constate que l'évolution médiocre de la productivité du travail persiste depuis plus d'une décennie au niveau agrégé de l'économie nationale. De plus, le coût salarial unitaire nominal, donc le coût du travail corrigé de la productivité, croît plus vite au Luxembourg que dans ses pays voisins et la zone euro dans son ensemble, entraînant ainsi une perte de la compétitivité-coût du Grand-Duché. Derrière cette évolution au niveau de l'économie nationale se cachent cependant des disparités sectorielles importantes. Le CNP appelle ainsi à des politiques différenciées afin de relancer la productivité; il s'agit de conjuguer les actions en faveur des déterminants généraux de la productivité avec les besoins spécifiques des différentes branches d'activité. Afin d'augmenter la productivité, la recherche et développement (R&D), l'innovation et la digitalisation, le renforcement et la reconversion des compétences de la main-d'œuvre ainsi que l'assouplissement continu du cadre réglementaire restent des domaines d'action prioritaires aux yeux du CNP. En complément, des efforts sont nécessaires pour favoriser l'intégration du progrès technologique et l'adoption des meilleures pratiques dans les entreprises. Le CNP invite finalement tous les acteurs, privés et publics, à mener une politique d'investissement ambitieuse, l'approfondissement du capital ayant généralement un impact positif sur la productivité du travail et la croissance économique.
Dans une optique de développement durable, le CNP retrace régulièrement l'évolution de la productivité des ressources et de l'énergie. Les analyses montrent que le Luxembourg n'a pas encore réussi à découpler sa consommation intérieure de matières de sa croissance économique au cours de la dernière décennie. L'évolution est par contre positive pour la productivité de l'énergie où le Luxembourg a réussi la dissociation entre la consommation d'énergie et la croissance économique, même si la part des énergies renouvelables dans la consommation finale brute d'énergie du Luxembourg reste faible. En conséquence, le Luxembourg accuse toujours une intensité élevée d'émissions de gaz à effet de serre, même si le pays affiche une tendance à la baisse depuis plusieurs années.
Comme chaque année, le rapport du CNP comprend une série d'études de recherche appliquée en matière de productivité, réalisées par Statec Research pour le compte du CNP. La première contribution présente les derniers résultats du projet LuxKLEMS qui permet d'examiner les sources de l'évolution de la productivité. Il apparait que la stagnation de la productivité du travail est liée à une productivité globale des facteurs faiblissante, c'est-à-dire que l'efficience avec laquelle le travail et le capital sont conjointement utilisés dans le processus de production ne s'est pas améliorée. Plus en détail, l'analyse révèle que l'évolution de la productivité du travail dans les activités de services est plutôt déterminée par l'intensité du facteur travail, tandis que le progrès technologique est une source prédominante de croissance de la productivité dans le secteur manufacturier.
La deuxième étude analyse l'accumulation et la composition du capital intangible dans l'économie marchande, ainsi que sa contribution à l'évolution de la productivité. En comparaison internationale, la part du capital intangible dans le capital total est relativement faible au Luxembourg, de même que sa contribution moyenne à l'évolution de la productivité du travail. Les tendances récentes indiquent toutefois une importance croissante du capital intangible dans l'évolution de la productivité et donc un potentiel d'amélioration de la productivité à travers des investissements dans des actifs intangibles.
La troisième contribution analyse la relation, supposée positive, entre la productivité et la qualité de la gestion d'entreprise. L'étude examine plus précisément le lien entre la performance des entreprises et deux pratiques managériales particulières, à savoir le suivi régulier des indicateurs de performance de l'entreprise et l'évaluation de la performance individuelle des employés. Les résultats préliminaires suggèrent que les entreprises qui attachent plus d'importance à ces pratiques managériales ont tendance à avoir une productivité plus élevée.
La quatrième et dernière étude se concentre sur l'innovation qui est un déterminant clé de la productivité. L'analyse trouve que des systèmes nationaux d'innovation jouent un rôle important dans la production efficace d'innovations. Ce résultat suggère que les pays peuvent conforter la croissance économique en renforçant leur système national d'innovation.
Le rapport annuel 2022-2023 du Conseil national de la productivité sera notifié à la Commission européenne et transmis au Conseil économique et social pour avis.
Le rapport peut être téléchargé sur le site web du Conseil national de la productivité.
Communiqué par le ministère de l'Économie/ Conseil national de la productivité